Archive/mémoire (2017) (français)

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Archive/mémoire est le résultat d’un souhait : celui-ci de présenter à l’Ensemble SuperMusique, qui se dédie à l’interprétation de partitions inusitées, un type de « notation » qu’il n’avait pas encore rencontré. Ce souhait est motivé par la fascination que j’entretiens pour la distinction qui dicte, pour simplifier, qu’une composition peut être reproduite, mais que cela est impossible par définition pour une improvisation. Chaque interprète a reçu une « partition » qui consiste en trois brefs extraits de ses propres improvisations documentées sur les enregistrements d’Ambiances Magnétiques (réalisés entre 1984 et 2016, grosso modo). Pendant l’exécution de la pièce, les interprètes sont invités à reproduire ce matériel avec leurs instruments, ainsi qu’à créer de nouvelles improvisations. Si la plupart des partitions servent de dispositif mémoriel pour permettre la réalisation sonore des idées du compositeur, et si la plupart des enregistrements servent à archiver ces idées réalisées, Archive/mémoire vient troubler cette distinction. Ici, les idées musicales réalisées sont des reproductions de reproductions des interprètes eux-mêmes ; l’archive d’improvisations enregistrées se transforme en compositions reproductibles qui font appel, pour leur exécution, à divers types de mémoire : mémoire sonore, mémoire musculaire, méthodes de transcription et trucs mnémotechniques. Pendant que les interprètes interpréteront leurs partitions, Michel F. Côté et moi allons diffuser les extraits sonores dans la salle, utilisant l’archive comme matériau musical génératif (avec un clin d’œil aux pionniers de ce domaine, de John Cage à Grandmaster Flash), activant peut-être la mémoire des auditeurs qui auront entendu le « même » matériel provenant de la scène dans une forme radicalement décontextualisée. Archive/mémoire est une structure ouverte qui dépend des décisions créatives prises en temps réel par les membres de l’ensemble. Donc, chaque réalisation de l’œuvre constitue une improvisation impossible à répéter.

–Scott Thomson, février 2017 (traduction: François Couture)